L’HISTOIRE DE LA MARINE – des origines à 1700
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1588. Galion de l’Invincible Armada (Espagne)

 

LA date de 1571 (bataille de Lépante) est une date capitale dans l’histoire du monde; celle de 1588 en est une autre, non moins importante, car elle marque le déclin de la puissance espagnole. Philippe II avait à se venger d’Élisabeth d’Angleterre, qui s’était moquée de sa laideur et l’avait refusé pour mari; en outre, il voulait mettre à la raison les Pays-Bas en perpétuelle rébellion. Il rassembla sur le Tage une immense flotte, que commandait le duc de Medina Sidonia. Avec les renforts qu’elle reçut en route, cette force jamais vue jusqu’alors comprenait 30.000 hommes embarqués sur 135 navires et disposait de 2.500 canons. Outre l’Espagne, le Portugal, Gênes et Venise avaient envoyé leurs galions, galéasses et galères. Une telle flotte était condamnée avant de combattre, car les navires qui la composaient étaient généralement- peu aptes à soutenir une bataille dans les mers du Nord; elle était insuffisamment préparée et les mercenaires enrôlés dans ses rangs n’avaient à défendre que leur maigre solde. Au surplus, elle ne parvint pas à faire sa jonction avec la flotte du duc de Parme qui devait lui fournir des pilotes connaissant le chemin à travers les dangereux bancs de sable de la Manche. Les Anglais, eux, n’avaient que 15.000 hommes, mais animés de la volonté farouche de combattre pour leur pays, et bien menés par de vrais marins, sur de petits navires rapides habilement manœuvrés. À l’entrée de la Manche, la flotte anglaise commandée par l’amiral Howard avec Francis Drake en sous-ordre, attendait l’Invincible Armada. Mais le 29 juillet 1588 devant Gravelinnes, l’affaire tourna au désastre pour les Espagnols, qui s’enfuirent, laissant de nombreux navires par le fond. La tempête qui suivit doubla les pertes de cette malheureuse flotte et finalement peu de navires vaincus rentrèrent en Espagne et en Méditerranée. Une victoire de l’Espagne eût probablement changé le cours de l’histoire. Sa flotte anéantie, ses colonies exposées allaient devenir, pour la plupart, les proies de l’Angleterre.