L’HISTOIRE DE L’AÉROSTATION – des origines à 1940
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1899. Dirigeable Santos-Dumont III (France)

CE qui contribuait à faire d’Alberto Santos-Dumont l’idole des foules parisiennes, c’était aussi son esprit de sociabilité et son sens aigu des valeurs humaines. Cet homme célèbre, millionnaire, sophistiqué, ami des princes et des ducs, inscrit dans les clubs les plus exclusifs des capitales européennes, adulé des plus hautes personnalités, aurait considéré comme une irréparable inconvenance le fait de sortir de chez lui sans ses gants. Pourtant, il ne dédaignait pas l’amitié des personnes humbles et s’entretenait cordialement avec ses mécaniciens - il en avait une petite aimée, et tous l’aimaient beaucoup. Il travaillait avec eux, d’égal à égal, en tachant au besoin de graisse son habit coupé chez le plus grand tailleur parisien. En matière technique, Santos-Dumont écoutait l’avis de tous, acceptant ce qu’il estimait juste et se réservant de vérifier ce qui en lui suscitait des doutes raisonnables. Par exemple, quand ses amis très élégants de l’AéroClub (qui comptaient parmi l’élite de la jeunesse parisienne) surent qu’il avait l’intention d’appliquer le moteur à explosion de son " tricycle " à son premier dirigeable, ils poussèrent un cri d’angoisse ; le Brésilien ne comprenait-il pas qu’en agissant ainsi, il courait vers un inévitable désastre ’ Selon eux, la combustion de l’essence aurait incendié et fait exploser tôt ou tard la masse d’hydrogène si inflammable contenue dans l’enveloppe. Ce qu’il fallait à Santos-Dumont, c’était un moteur électrique ! Mais Santos-Dumont resta fidèle à sa première idée : il étudia la mise en place du moteur à 10 m au moins de la zone de danger, et démentit ainsi toutes les appréhensions de ses amis par la réussite de son premier vol. Ce succès initial l’exalta et lui donna pleine confiance en ses intuitions. Le modèle représenté ici est le Santos-Dumont III, construit en 1899, plus grand et plus maniable que le premier, doté d’un nouveau système de gouvernail. La fin de l’aventure est clairement décrite par le dessin d’Hergé, sans qu’il soit besoin de la raconter. Une fois encore, le tenace Alberto se tira d’affaire sans aucun mal.